C et article présente un outil d’évaluation du trouble du stress post-traumatique (TSPT) pour une utilisation dans la pratique clinique: la PCL-5 version française. Nous discuterons des différentes versions, du ciblage du ou des événements et des versions brèves de la PCL-5.  

 

 

 Qu’est-ce que la PCL-5?

Comme je l’explique dans « psychothérapies pour le trouble du stress post-traumatique » (Orban, 2022), « la PCL-5 est une échelle auto-rapportée qui reprend un par un les critères diagnostiques du DSM-5 en demandant au patient de se situer entre « pas du tout » et « extrêmement ». Chaque item se voit attribuer un score allant de 0 à 4. Le score global est calculé très simplement en additionnant les scores des items et varie donc de 0 à 80. Il est proposé de fixer le seuil diagnostique à 31 pour la version anglaise (Weathers et al., 2013) et à 32 pour la version française (Ashbaugh et al., 2016). Bien qu’il n’y ait qu’une seule version des vingt items, celle-ci peut être proposée avec, en complément, une évaluation du critère A (l’événement traumatique qui doit répondre aux critères du DSM-5) et éventuellement, la LEC-5, une échelle évaluant la présence de seize événements qui sont souvent associés au TSPT. Pour émettre un diagnostic prévisionnel (qui ne pourra être confirmé que par un examen clinique semi-structuré), il faudra veiller à ce que l’échelle utilisée porte sur le dernier mois et non sur la dernière semaine. »

Les versions françaises de la PCL-5  

Il existe au moins trois versions de la PCL-5 en version française. Nous proposons de les comparer en relation avec la version anglaise originale (Weather et al., 2013).
Si l’on traduit les instructions de la version anglaise originale à partir du logiciel de traduction deepL, nous obtenons ceci :

« Vous trouverez ci-dessous une liste de problèmes que les gens rencontrent parfois en réaction à une expérience très stressante. En gardant à l’esprit votre pire événement, lisez attentivement chaque problème, puis sélectionnez l’un des chiffres à droite pour indiquer dans quelle mesure vous avez été gêné par ce problème au cours du mois écoulé. Votre pire événement : ____ »

Notons que la version originale de la PCL-5 nous semble devoir être critiquée pour son manque de clarté concernant « le pire événement » -« worst event ». En effet, il est nécessaire de cibler l’événement « le plus perturbant actuellement », qui n’était pas nécessairement « le pire événement au moment du passé ». Foa et al. (2007) proposent de regarder quel est l’événement du passé dont le souvenir est le plus stressant actuellement pour le patient. Mais cela reste incomplet à notre sens. En effet, l’objectif est de cibler l’événement qui produit un trouble du stress post-traumatique actuellement. Nous proposerions donc l’événement terminé depuis minimum 1 mois qui produit le plus d’intrusions et de stress actuellement.

Notons que la version originale de la PCL-5 est très proche de la traduction française de Norman Shields (Anciens Combattants Canada) et Stéphane Guay (Université de Montréal) :

« Vous trouverez ci-dessous une liste de problèmes que les gens éprouvent parfois à la suite d’une expérience très stressante. Veuillez s’il-vous-plait lire chaque problème soigneusement et encercler un chiffre à droite pour indiquer à quel point vous avez été dérangé par ce problème au cours du dernier mois. Assurez-vous de baser vos réponses sur des problèmes qui sont apparus ou se sont aggravés après l’évènement. L’évènement que vous avez vécu était en … (évènement) (préciser mois/année) »

Dans la version de Shields et Guay (2013), il n’est pas clairement fait mention au « pire événement » mais il est bien demandé de mentionner clairement un événement. Par contre, dans la traduction proposée par Alain Brunet et qui a fait l’objet d’une étude validation menée par Asbaugh et al. (2016), il n’est plus fait mention à un seul événement et il n’est pas clairement demandé de le garder en tête en répondant aux questions :

« Voici une liste de problèmes que les gens éprouvent parfois suite à une expérience vraiment stressante. Veuillez lire chaque énoncé attentivement et encercler le chiffre à droite pour indiquer dans quelle mesure ce problème vous a affecté dans le dernier mois. »

Il est donc essentiel de prendre le temps de bien identifier un ou des événements avec le patient avant de recourir à la version traduite par Brunet. Nous recommandons également de bien préciser au patient que les symptômes doivent être liés à ces événements ou s’être aggravés depuis ceux-ci. Notons que cette traduction est identique à celle de Desbiendras (2013) pour laquelle les mêmes précautions s’appliquent :

« Voici une liste de problèmes que les gens éprouvent parfois suite à une expérience vraiment stressante. Veuillez lire chaque énoncé attentivement et cocher la case pour indiquer dans quelle mesure ce problème vous a affecté dans le dernier mois ».

En somme, pour l’instruction générale, notre préférence va pour la version de Shields et Guay qui demande clairement d’identifier un événement et de baser ses réponses sur des problèmes qui sont apparus ou se sont aggravés après l’évènement. Nous recommandons toutefois de s’assurer que l’événement de référence est l’événement le plus stressant ou perturbant actuellement.  

La PCL-5 version anglaise peut être téléchargée facilement.
De même pour la version de Desbiendras.
Pour obtenir la version de Shields et Guay ou la versio de Brunet, nous recommandons de contacter les auteurs ou des chercheurs utilisant ces échelles.

Faut-il absolument déterminer les événements de référence pour la PCL-5 ?

La réponse est sans hésitation : « oui ! ».  Bodkin et al. (2007) ont montré que si on supprime la référence à un événement traumatique clairement défini, il est facile d’obtenir des symptômes intrusifs, d’évitements, de modification des cognitions et de l’humeur et d’activation neurophysiologique auprès de personnes qui ne sont pas traumatisées. Cependant, ces symptômes ne sont pas des symptômes post-traumatiques s’ils ne se rapportent pas à un événement autobiographique précis.

Il est donc nécessaire de déterminer clairement le ou les événements concernés avant de recourir à la PCL-5. Comme nous l’avons vu, Shields et Guay (2013) proposent de se baser uniquement sur un événement. Cependant, le DSM-5 (2017) est très clair sur le fait que les symptômes de TSPT peuvent être liés à un ou plusieurs événements traumatiques Toutefois, cela ne doit pas exempter le praticien de préciser clairement avec le patient quels sont les événements traumatiques concernés. Quand il y en a beaucoup, pour des traumas répétés d’abus sexuel ou de violence conjugale par exemple, Shapiro (2007) recommandait de les organiser en paquets. Il est ensuite possible de sélectionner l’événement le plus perturbant du paquet (tableau 7.2, tiré de « psychothérapies pour le trouble du stress post-traumatique »).

Et si le patient éprouve des difficultés à identifier les événements perturbants actuellement ?

Parfois, le patient identifie facilement quel est (ou quels sont) l’événement perturbant actuellement et il est possible d’évaluer le trouble du stress post-traumatique dans la suite de l’anamnèse. Mais quand les histoires traumatiques sont complexes, il n’est pas toujours facile pour le patient de pouvoir identifier clairement les événements perturbants actuellement. Dans ces cas-là, nous recommandons de d’abord prendre le temps d’effectuer un index traumatique avec lui. Celui-ci consiste à prendre du recul avec le patient sur son histoire de vie et répertorier les événements traumatiques auxquels il a déjà été confronté (voir tableau 7.2 plus haut).

Quelle est l’utilité de la PCL-5  dans la pratique clinique ordinaire?

Comme il s’agit d’un questionnaire auto-rapporté, la PCL-5 est souvent utilisée dans les études cliniques. Mais quelle est son utilité pour la pratique clinique ordinaire ?

Tout d’abord, La PCL-5 n’est pas le premier questionnaire recommandé à une fin diagnostique. Cela signifie qu’en cas d’hésitation ou pour des diagnostics officiels dans le cadre d’expertise par exemple, il est plus indiqué de recourir à la CAPS-5. Il existe une version française de Rivest-Beauregard et al. (2022).
Toutefois, la PCL-5 peut à mon sens être utilisée comme support complémentaire pour une interview structurée visant à évaluer si le patient répond aux critères du DSM-5, surtout dans des contextes ou le temps doit être optimisé. Il est important que le praticien veille à demander des exemples concrets au patient pour ses symptômes et qu’il s’assure bien de la relation entre ceux-ci et l’événement. L’avantage de la PCL-5 est qu’elle est moins « lourde » ou fastidieuse que la CAPS-5.

A côté de cela, l’utilité principale de la PCL-5 dans la pratique ordinaire est qu’elle peut être utilisée pour des mesures de suivi au cours de la thérapie. En effet, le meilleur moyen de savoir où l’on se situe quant à l’efficacité du traitement pour le patient est d’évaluer régulièrement le trouble du stress post-traumatique. Pour rendre la mesure encore plus efficiente, on peut utiliser des versions abrégées à 4 et 8 items de la PCL-5 (Price et al., 2016 ; Zuromski et al., 2019). La version à 8 items reprend les items B1, B3, B4, D2, D4, D5, D7, E1 (la lettre correspond au cluster et le chiffre à l’ordre de l’item dans le cluster- ex: B1=premier item des symptômes intrusifs).
Il est toujours nécessaire de recourir à la version complète pour évaluer si le traitement pour un événement est terminé.

 Conclusion

La PCL-5 est une échelle de référence que tout praticien spécialisé dans la prise en charge du TSPT doit connaître. Il est indispensable de bien déterminer les événements concernés avant la passation de l’échelle. Elle est particulièrement utile quand le temps doit être optimisé. Et des versions courtes existent pour réaliser des mesures de suivi au cours de la thérapie. Dans le cadre d’une expertise ou s’il s’avère difficile de poser un diagnostic, la CAPS-5 doit être utilisée.  

SOURCES

      Ashbaugh, A. R., Houle-Johnson, S., Herbert, C., El-Hage, W., & Brunet, A. (2016). Psychometric validation of the English and French versions of the Posttraumatic Stress Disorder Checklist for DSM-5 (PCL-5). PLoS One, 11(10), e0161645. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0161645

      Bodkin, J. A., Pope, H. G., Detke, M. J., & Hudson, J. I. (2007). Is PTSD caused by traumatic stress? Journal of Anxiety Disorders, 21(2), 176–182.

      DSM-5. (2017). Diagnostic and statistical manual of mental disorders. American Psychiatric Association. https://www.psychiatry.org/psychiatrists/practice/dsm

      Foa, E. B., Hembree, E. A., & Rothbaum, B. O. (2007). Prolonged exposure therapy for PTSD: Emotional processing of traumatic experiences; therapist guide. Oxford University Press.

      Orban, P. (2022). Psychothérapies pour le trouble du stress post-traumatique. Paris: Dunod.

      Price, M., Szafranski, D. D., van Stolk Cooke, K., & Gros, D. F. (2016). Investigation of an abbreviated 4 and 8 item version of PTSD Checklist. Psychiatry Research, 5. DOI: 10.1016/j.psychres.2016.03.014

      Rivest-Beauregard, M., Brunet, A., Gaston, L., et al. (2022). The Clinician-Administered PTSD Scale for DSM-5 (CAPS-5) Structured Interview for PTSD: A French Language Validation Study. Psychological Assessment, 34(3), e26-e31.

      Shapiro, F. (2007). Manuel d’EMDR: Principes, protocoles, procédures. Paris: Dunod.

      Weathers, F. W., Litz, B. T., Keane, T. M., Palmieri, P. A., Marx, B. P., & Schnurr, P. P. (2013). The PTSD Checklist for DSM-5 (PCL-5). Scale available from the National Center for PTSD at www.ptsd.va.gov.

      Zuromski, K. L., Ustun, B., Hwang, I., Keane, T. M., Marx, B. P., Stein, M. B., Ursano, R. J., & Kessler, R. C. (2019). Developing an optimal short-form of the PTSD Checklist for DSM-5 (PCL-5). Depression and Anxiety, 36(9), 790-800. doi: 10.1002/da.22942.

       

      Pierre Orban

      Psychologue Clinicien – Formateur FCPS

      Livre en lien

      « A lire absolument pour améliorer ses prises en charge psychothérapeutiques. » Frédéric Chapelle, Psychiatre et Conférencier 

      « Il va trouver sa place dans la revue de littérature de notre diplôme de psychologie d’urgence et TCC. » Sylvain Goujard, Fondateur du Diplôme Universitaire en psychologie d’urgence et TCC

      « En conclusion, compte tenu de la rigueur scientifique de l’ouvrage, du fait que de nombreuses stratégies thérapeutiques d’excellence dans le TSPT sont rapportées (pour certaines peu connues du public francophone), des nombreux exemples de cas cliniques, il m’est facile de recommander sa lecture aussi bien aux étudiants qu’aux professionnels pratiquant depuis des années, voire à des enseignants universitaires » Martine Bouvard, Professeure de psychologie clinique